Pour l’Amour d’un Ange (épisode 8)

Damon, après un instant de stupeur, se rua vers la maison de Julien. En un instant, il fut près de lui et la situation s’inversa. Julien, libéré de l’étranglement qui l’immobilisait, glissa lentement jusqu’à se retrouver assis par terre, un peu assommé. Patrick, surpris par l’attaque et incapable de contrer la force surhumaine qui l’empoignait, fut soulevé de terre puis collé au mur à un mètre du sol. Le cou serré dans la main énorme du démon, il gigota tel un insecte pour se défaire de la prise mortelle, avant de se rendre compte que la créature qui le maintenait n’était pas humaine.

La peur changea de camp, le couteau tomba dans un bruit métallique. Damon, rendu fou de colère par les visions d’horreur qui l’envahissaient leva sa main libre, il agita ses doigts aux griffes acérées. Il allait se servir de ces dernières pour arracher chaque centimètre de la peau du corps tremblant de Patrick, quand une voix qu’il connaissait bien s’éleva dans la pièce.

— Agthuxaz !

Retenu par le pouvoir qu’il sentait dans son dos, le bras de Damon s’abaissa, sa prise sur le cou de Patrick se dessera et il recula d’un pas. Le corps de Patrick resta pourtant scotché au mur, la poigne de Damon désormais remplacée par une sorte de toile d’araignée. Celle-ci s’enroulait autour du corps épinglé pour le maintenir en place. Il était toujours vivant. Chacun des fils qui marquait la peau visible de traces de brûlures et l’expression de souffrance sur son visage congestionné le prouvaient.

Avant de se retourner, Damon aida Julien à se relever. Inquiet, il l’enlaça et le serra contre lui en espérant atténuer sa détresse.

— Tu vas bien ? demanda-t-il dans un murmure.

— Je… Oui… Qui êtes-vous ?

Étonné de se sentir en sécurité dans les bras de cet… être à la peau verdâtre, aux muscles très imposants et portant des cornes, Julien ne tenta pas de s’éloigner.

— C’est moi, c’est Damon, chuchota le démon.

La surprise de Julien ne dura pas très longtemps, la même voix qui avait prononcé ce mot bizarre s’éleva, un peu énervée.

— Bon sang ! Tu as encore gagné, fais chier !

Le démon, Julien et la famille de Patrick qui n’avait pas bougé, figée par la terreur, se retournèrent tous d’un seul bloc. Leurs visages se statufièrent. Devant eux se tenaient Lucifer et l’ange Gabriel.

Ce dernier eut un sourire aussi doux que victorieux.

— Oui, tu es à nouveau ma chose pour les cent prochaines années, mon beau.

Amélie s’avança vers les deux nouveaux venus. De façon étonnante, elle n’était pas effrayée de rencontrer les deux êtres supérieurs.

— Savez-vous où est ma fille et qu’allez-vous faire de Patrick ?

Gabriel lui adressa un sourire doux.

— Caroline est heureuse, elle veille sur son mari et ses enfants. Ils reviendront très vite près de vous. Et pour Patrick, voulez-vous vraiment connaître son destin ?

La voix profonde de Lucifer intervint avant qu’elle n’ait le temps de répondre.

— Patrick va venir avec moi, il a un logement prévu spécialement pour lui dans mes enfers. Il est une des âmes dont je dois m’occuper personnellement. Cela vous convient-il ?

— Oui, souffla Amélie, d’un ton soulagé.

Le hoquet de surprise de Damon n’échappa à personne.

— Mais je ne dois pas être celui qui te l’envoie ?

— Non, c’était ta dernière mission. Mais laissez-nous raccompagner Amélie et sa famille pour qu’ils puissent rentrer chez eux et réveillonner avec sérénité. Ensuite, nous vous expliquerons tout.

***^+*+***

Dès qu’ils furent seuls dans la pièce, Julien regarda Damon qui ne ressemblait plus à l’homme qu’il connaissait.

— C’est pour ça que tu me fuyais, parce que tu n’es pas… euh… tu es…

Incapable de finir sa phrase, il ne put s’empêcher de se lover contre Damon. Il se sentait si bien dans ses bras, il y était en sécurité, heureux et aimé. Surpris de ne pas être effrayé, il ne put quitter les yeux de l’étrange créature qui le couvait d’un regard tendre.

— Je… Le jour de mon arrivée, je t’ai vu, bafouilla Damon. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai eu chaud partout. Puis, tout à coup, j’ai pensé que Lucifer m’avait envoyé dans cette maison pour toi… J’étais persuadé que je devais te tuer et je n’en avais pas du tout envie, alors, je te fuyais, pour ne pas découvrir tes méfaits et éviter d’être obligé d’effectuer mon devoir.

— Oh ! Tu ne sais pas à l’avance qui tu dois…

— Non, parfois, je dois attendre longtemps avant de rencontrer ma cible… bref, je t’admirais de loin. Plus les jours passaient, plus j’étais réticent… C’est pour ça que je faisais durer la mission le plus longtemps possible.

Damon soupira, il aurait pu être proche de Julien dès le début. Il aurait pu le tenir dans ses bras, bien avant. Il aurait pu l’aimer et peut-être, lui éviter de subir l’attaque de Patrick.

— Oui, je l’avais remarqué ! s’éleva à nouveau la voix, pleine de sévérité, de Lucifer.

Julien grimaça, cette voix lui faisait froid dans le dos. Damon sentit son malaise, il lui fit un clin d’œil.

— Ne t’inquiète pas, je ne crois pas qu’il soit là pour me punir, murmura-t-il.

Puis, sans se séparer, ils se tournèrent vers les deux êtres supérieurs.

— Est-ce le moment où tu me donnes une explication ?

— Mais c’est qu’il deviendrait insolent, gronda Lucifer.

— À quoi t’attendais-tu ? se moqua Gabriel. C’est un démon, il est né avec l’insolence ancrée en lui.

— Toi, tais-toi quand je parle à mon démon !

— Toi, rabaisse ton caquet ! Tu es ma chose pour un siècle supplémentaire, tu l’oublies un peu trop vite.

Gabriel passa sa main dans le cou de Lucifer et celui-ci se dandina sous la caresse. Damon et Julien affichèrent tous les deux une mine ébahie.

— Vous couchez ensemble ! s’exclamèrent-ils d’une seule voix.

Lucifer et Gabriel éclatèrent de rire.

— Évidemment, sinon, aucun de vous deux n’aurait vu le jour ! ironisa Gabriel en levant les yeux au ciel.

Julien s’écarta précipitamment de Damon.

— Nous sommes frères ! s’écria-t-il.